Une nouvelle étape de la campagne de vaccination contre la Covid-19 a débuté ! Les médecins généralistes peuvent désormais vacciner leurs patients âgés entre 50 et 64 ans souffrants de comorbidité. Comment s’est passée cette première journée ? Cette nouvelle stratégie va t-elle suffire à endiguer l’épidémie du coronavirus ? Les explications du Dr Michel Till, médecin généraliste et représentant du syndicat CSMF (Confédération des Syndicats Médicaux Français), invité de l’émission « Votre Santé ».
La vaccination contre la Covid-19 chez les médecins généralistes a officiellement débuté cette fin de semaine. En France, près de 50 000 d’entre eux se sont portés volontaires pour vacciner leurs patients de 50-64 ans atteints de comorbidité. Pour cette vaccination, c’est le vaccin AstraZeneca qui a été retenu. Comment s’est déroulée cette première journée ? Globalement, le virus circule t-il autant depuis le début de la vaccination ?
Éléments de réponse avec le docteur Michel Till, médecin généraliste à Lyon 6e et représentant du syndicat CSMF, invité d’Elodie Poyade et de Pascal Auclair dans l’émission Votre Santé (BFM Lyon).
Vaccination Covid-19 : des retards de livraison
Tout d’abord, docteur, est-ce une bonne chose que les tests salivaires arrivent dans les écoles ?
Michel Till : Oui, C’est une bonne chose de pouvoir tester les enfants. Jusqu’à maintenant, on évitait de tester les petits, en dessous de 6 ans. Avec l’arrivée des variants, c’est quand même un vrai souci. Donc, c’est bien de pouvoir tester autrement, de manière non-agressive.
Tester mais aussi vacciner. Alors que la campagne de vaccination débute aujourd’hui chez les médecins généralistes, certains grossistes n’ont pas pu livrer les pharmacies à temps. Par conséquent, tous les médecins n’ont pas reçu les doses. C’est votre cas ?
Oui, malheureusement. Notre cabinet de groupe avait commandé deux flacons de vaccins. Finalement, il faudra patienter jusqu’à la semaine prochaine. Heureusement, on a été prudent. Nous n’avons pas pris les rendez-vous au préalable.
Vaccination Covid-19 : seulement 10 doses par médecin pour le moment
Un cabinet de quatre médecins, cela veut dire environ dans un premier temps 40 patients vaccinés par jour ?
Non, c’est par semaine ! La première semaine, on aura dix doses. Nous nous sommes équipés d’un frigo pour garder pendant 48 heures les doses de vaccin.
10 doses pour la première semaine, puis le nombre va augmenter au fil des semaines. C’est quand même un début de campagne poussif, non ?
Ce n’est pas si poussif que cela. Il y a près de 55 000 généralistes volontaires et probablement 20 doses la deuxième semaine. Si l’on fait 20 doses pendant 4 semaines pour les 55 000
médecins (4 x 55 000 x 20) cela équivaut à 4,5 millions de patients vaccinés en un mois. Ce n’est pas si mal !
Vaccination Covid-19 : “les 50-64 ans sont beaucoup moins réactogènes”
On est quand même sur des jauges très limitées. Comment cela va se passer et quels sont les heureux élus de cette première vaccination chez les médecins ? J’imagine que vous avez beaucoup de sollicitations…
Oui, nous avons beaucoup de sollicitations. Ces dernières sont surtout pour le vaccin Pfizer. Au début, les patients disaient qu’ils n’en voulaient pas et qu’il leur faisait peur. Maintenant, ils disent qu’ils veulent du Pfizer et que l’AstraZeneca fait peur. Pourquoi ? Parce qu’il y a eu beaucoup de battage médiatique sur les effets secondaires du vaccin AstraZeneca. En Bretagne, par exemple, ils ont arrêté de vacciner une population jeune très réactogènes d’infirmiers, infirmières et aides-soignants. Beaucoup ont contracté des symptômes grippaux (maux de tête, fièvre) pendant 24-48 heures, ce qui a justifié un arrêt. Comme ils ont piqué tout le monde le même jour, il n’y avait plus personne le lendemain ! Cette situation a fait peur. Heureusement, la population des 50-64 ans est beaucoup moins réactogène. Si l’on regarde ce qui s’est passé en Angleterre et ailleurs, on constate des petites réactions mais pas de quoi s’alarmer.
“L’AstraZeneca fait peur”
L’équation bénéfice-risque est donc valable avec l’AstraZeneca ?
Oui. L’AstraZenca est fondamentalement efficace dans la tranche 55-65 ans, surtout avec comorbidité. Est-ce que vous préférez avoir pendant 24 heures un petit mal de tête et prendre deux dolipranes ou alors vous retrouver en réanimation pendant 15 jours ? Cela ne se discute même pas. On leur dira simplement de prendre un paracétamol en partant de chez nous ou en arrivant chez eux…
Comment allez-vous sélectionner les premiers qui se feront vacciner chez vous ? Est-ce une question d’âge ? De comorbidité ?
C’est une question de comorbidité. Ce qui est le plus important, c’est leur fragilité. On a sélectionné les patients 50-65 non-révolus en se référant à la liste de l’HAS : diabète, HTA (hypertension artérielle, ndlr), les BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive, ndlr), les cardiaques, les autistes… J’ai sélectionné 11 patients pour la première semaine. Donc, il va falloir que j’en décale un à la semaine d’après…
Vaccination Covid-19 : “il faut que l’on se bouge”
Pour le moment, dans notre région, plus de 300 000 personnes ont reçu une première dose de vaccin depuis le 4 janvier. C’est moins de 4 % de la population de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Est-ce qu’à, ce rythme-là, nous arriverons à tenir les objectifs fixés par l’exécutif, c’est-à-dire tout le monde vacciné d’ici la fin de l’été ?
Il faut que l’on se bouge ! Pour cela, il faudrait que l’on arrive à avoir plus de doses. Mais, même si je ne veux pas faire de chauvinisme local, on a quand même eu l’impression que Lyon n’était pas très bien doté alors que c’est la deuxième ville de France. Que ce soit pour le Pfizer ou l’AstraZeneca, on réclame mais on ne voit rien venir…
Une hausse des cas à cause du variant anglais
On évoque, depuis un certain temps, un plateau haut avec plutôt une tendance à la baisse. Est-ce que c’est votre ressenti ?
Certainement pas cette semaine, au contraire. Là, cela repart très vite avec le variant anglais même s’il n’est pas encore devenu majoritaire. Nous étions à 27 % de variant anglais sur le Rhône, la semaine dernière. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus. On a l’impression que cela monte rapidement.
On voit un peu de partout en France, une hausse des chiffres avec des mesures qui sont prises notamment des confinements locaux dans certains départements. Pour l’instant dans le Rhône, nous sommes épargnés. Vous pensez que c’est temporaire ?
Jusqu’à maintenant, c’est vrai que le Rhône est à peu près contrôlé. Cependant, quand vous vous promenez dans la rue, on constate que les mesures ne sont pas si bien respectées. Vous voyez que devant les clicks and collect, certains boivent un verre, d’autres enlèvent leur masque pour fumer… Ce n’est quand même pas parfait. Loin de là…
Des patients touchés par la Covid beaucoup plus jeunes
La reprise de l’épidémie s’explique clairement par les variants, notamment le variant anglais. Le profil des patients infectés évolue-t-il aussi ?
Oui. Les patients qui viennent nous voir sont beaucoup plus jeunes que lors de la vague précédente. C’est comme au début d’été dernier. Ce sont majoritairement des 25-40 ans.
Avec cette hausse, le gouvernement qui était plutôt optimiste, change un peu de discours en préparant un éventuel confinement. Un confinement strict de 4 semaines, êtes-vous pour ou contre ?
C’est compliqué. C’est vraiment une décision politique. Sur un plan sanitaire pur, c’est sûr que si l’on isole complètement et que c’est respecté, nous allons casser la contamination. Après, il y a toutes les conséquences derrière : psychologiques, scolaires, économiques.
Je suis content que cela ne soit pas à moi de prendre la décision. Sur un plan sanitaire, c’est la solution. Mais est-ce que l’on a que le sanitaire ? C’est difficile. On voit que l’épidémie psy est là aussi. Les psychiatres et psychologues nous alertent et ils ont raison.
Pour voir l’émission Votre Santé du jeudi 25 février en replay sur BFM Lyon.
À SAVOIR
Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, 3 300 médecins se sont portés volontaires pour vacciner leurs patients à risque de formes graves du Covid-19, selon l’Agence Régionale de Santé.