
Avec le temps, nos dents changent de couleur. Ce léger voile jaune, souvent perçu comme un signe de négligence, est en réalité un phénomène naturel, multifactoriel, et parfois inévitable. Mais avant de céder aux promesses des blanchiments “miracles”, mieux vaut comprendre les vraies raisons de ce changement.
On ne s’en rend pas compte tout de suite. Les années passent, les cafés s’enchaînent, le vin des dîners s’ajoute aux infusions du soir, et un jour, dans le miroir, le sourire semble moins lumineux qu’avant.
Selon une étude de l’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD), près d’un Français sur deux trouve la teinte de ses dents “insatisfaisante”. Ce n’est pas qu’une affaire d’esthétique ; c’est aussi une question de confiance, d’expression.
Le jaunissement dentaire touche tout le monde, à des degrés divers. Il ne dit rien d’une mauvaise hygiène, mais beaucoup de notre mode de vie, de notre alimentation, et de la nature même de nos dents. Alors, pourquoi ce changement ?
Le rôle de l’émail et de la dentine : une histoire de couches
Pour comprendre pourquoi les dents jaunissent, il faut d’abord savoir de quoi elles sont faites. La partie visible de la dent, la couronne, est recouverte d’émail, la substance la plus dure du corps humain. Cet émail est naturellement blanc, mais, avec le temps, il s’use. En dessous, on trouve la dentine, un tissu jaunâtre qui transparaît davantage à mesure que l’émail s’amincit.
Et le jaunissement lié à l’âge est inévitable. L’émail s’érode lentement avec le temps, laissant apparaître la dentine. C’est un processus biologique normal. Cette érosion naturelle est amplifiée par certains comportements du quotidien : brossage trop vigoureux, alimentation acide ou produits abrasifs.
Un cercle vicieux, puisque plus l’émail s’amincit, plus la dent devient sensible aux taches.
Hygiène bucco dentaire : les grands coupables du jaunissement
Café, thé, vin : le rôle des boissons et aliments colorés
Difficile de se passer du café du matin, du thé après le déjeuner, du verre de vin rouge entre amis… Leur point commun ? Des pigments puissants (appelés chromogènes) et des tanins, ces molécules qui se fixent sur l’émail comme un colorant sur un tissu. Avec le temps, ces micro-dépôts s’accumulent, surtout si l’émail est fragilisé ou si les dents présentent des microfissures.
Une étude menée en 2023 par Sunstar GUM France a montré que la consommation quotidienne de café accentue les taches pigmentaires chez plus de 70 % des adultes observés pendant douze mois. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas tant la chaleur ou l’acidité qui posent problème, mais bien la concentration en tanins. Ces derniers, en s’oxydant, foncent et se fixent sur la surface dentaire, altérant progressivement la clarté du sourire.
Le thé noir et les infusions rouges (hibiscus, fruits rouges) sont tout aussi colorants. Même les amateurs de sauce soja, de curry ou de betterave peuvent constater une légère altération de la teinte au fil du temps. Cela ne veut pas dire qu’il faut tout bannir. Il s’agit plutôt d’équilibrer, de varier, et de rincer sa bouche à l’eau claire après consommation, un geste tout simple mais diablement efficace.
Le tabac, ennemi numéro 1
On le sait, mais il faut le redire. Le tabac laisse une empreinte durable sur les dents. Ce n’est pas seulement une question d’esthétique, mais de chimie. La nicotine et le goudron présents dans la fumée s’oxydent au contact de l’air et se déposent à la surface des dents, formant un film jaunâtre, puis brunâtre.
Ces taches dites “extrinsèques” (en surface) sont parmi les plus difficiles à éliminer. Elles s’incrustent dans les pores microscopiques de l’émail et résistent souvent au brossage classique. À long terme, le tabac accentue aussi la formation de tartre et favorise la récession gingivale (le recul de la gencive) qui rend les dents plus sensibles et plus ternes.
Le Haut Conseil de la santé publique, dans ses recommandations 2023 sur la prévention bucco-dentaire, rappelle que le tabac « altère la couleur de l’émail et accroît le risque de maladies parodontales ». En clair, il jaunit, mais il fragilise aussi.
Le tartre et la plaque dentaire, à ne pas confondre !
On les confond souvent, et pourtant ils sont bien différents. La plaque dentaire est un biofilm transparent composé de bactéries et de résidus alimentaires. Elle se forme quelques heures seulement après le brossage. Si elle n’est pas éliminée, elle se minéralise au contact de la salive et devient tartre. C’est-à-dire une couche dure, poreuse, jaunâtre, qui s’accroche tenacement à la base des dents.
Ce tartre, en lui-même, ne colore pas la dent… mais il crée une surface irrégulière sur laquelle les pigments du café, du vin ou du tabac se fixent beaucoup plus facilement. Les tâches s’intensifient alors avec le temps et le sourire perd de sa luminosité.
Selon l’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD), un détartrage professionnel une à deux fois par an permet non seulement de prévenir les maladies gingivales, mais aussi de “rafraîchir” la teinte naturelle des dents, en supprimant les colorations superficielles dues au tartre.
Les médicaments et les facteurs internes
Certaines colorations, enfin, ne dépendent pas de ce que l’on mange ou de la manière dont on se brosse les dents. Elles trouvent leur origine à l’intérieur même de la dent.
Les tétracyclines, une famille d’antibiotiques largement prescrite jusque dans les années 1990, peuvent, lorsqu’elles sont administrées pendant la formation des dents (chez l’enfant ou la femme enceinte), laisser des taches grisâtres ou brunâtres permanentes. Ces marques, dites intrinsèques, sont impossibles à éliminer par un simple brossage.
De même, une fluorose, provoquée par un excès de fluor pendant la croissance, peut créer des marbrures blanchâtres ou jaunâtres sur l’émail. L’Inserm rappelle dans son dossier “Fluor et santé bucco-dentaire” que “le fluor est bénéfique à faible dose, mais nocif à haute concentration prolongée”. D’où l’importance de ne pas multiplier les sources (eau fluorée, compléments, dentifrices) sans suivi médical.
Certaines affections générales (troubles du métabolisme, prise prolongée de fer ou de certains antihistaminiques) peuvent aussi modifier la couleur des dents. Dans ces situations, seul un bilan dentaire complet permet de poser un diagnostic précis.
Les fausses bonnes idées du blanchiment dentaire maison
Face à un sourire jauni, les réseaux sociaux regorgent de recettes dites “naturelles” pour blanchir les dents : bicarbonate, citron, charbon actif, huile de coco… Si certaines ont un effet temporaire, d’autres sont carrément déconseillées.
- Le citron, très acide, peut dissoudre l’émail et rendre la dent plus sensible.
- Le bicarbonate, trop abrasif, raye la surface dentaire et accentue le jaunissement à long terme.
- Quant au charbon actif, son efficacité n’a pas été prouvée scientifiquement.
L’Académie américaine de dentisterie esthétique (AAED) souligne même que ces méthodes “abrasives” présentent plus de risques que de bénéfices si elles sont mal dosées.
En France, l’Ordre National des Chirurgiens-Dentistes rappelle que “tout produit éclaircissant contenant plus de 0,1 % de peroxyde d’hydrogène” est réservé à un usage professionnel. Les kits vendus sur Internet, souvent non conformes, peuvent provoquer des irritations des gencives ou une hypersensibilité dentaire.
Blanchiment dentaire : des solutions naturelles, oui, mais encadrées
Miser sur la régularité
Un brossage deux fois par jour, avec une brosse souple et un dentifrice fluoré, reste la base. Il ne s’agit pas seulement de “nettoyer”, mais d’empêcher la plaque de se fixer. L’UFSBD conseille également un détartrage annuel pour éliminer les dépôts minéralisés.
Après un repas ou une boisson colorée, rincer la bouche à l’eau claire limite la fixation des tanins. Simple, mais efficace.
Choisir des dentifrices adaptés
Les dentifrices dits “blancheur” ne blanchissent pas à proprement parler. Ils polissent doucement l’émail grâce à des agents abrasifs fins, comme la silice. Des marques comme GUM Original White utilisent justement ce principe : des particules douces pour éliminer les taches sans user l’émail.
Une étude clinique menée en 2022 par le groupe Sunstar montre que ce type de formule permet de réduire jusqu’à 90 % des taches superficielles en quatre semaines, sans augmenter la sensibilité dentaire.
Surveiller son alimentation
Une alimentation équilibrée, riche en fruits et légumes croquants (comme la pomme ou le céleri), aide à “auto-nettoyer” la surface des dents. À l’inverse, une consommation excessive de sodas, de plats acides ou sucrés accélère l’érosion de l’émail.
Les dentistes recommandent aussi de ne pas se brosser les dents immédiatement après un repas acide : attendre une vingtaine de minutes évite de fragiliser l’émail déjà ramolli.
Et quand cela ne suffit pas ?
Certains jaunissements sont internes, structurels ou anciens. Dans ce cas, les remèdes naturels ne suffisent plus. Le blanchiment professionnel pratiqué par un chirurgien-dentiste utilise des gels à base de peroxyde d’hydrogène à concentration contrôlée. Les résultats sont durables et encadrés médicalement.
Un blanchiment ne doit jamais se faire sans bilan préalable. Des caries ou une sensibilité non traitée peuvent transformer un simple éclaircissement en véritable douleur.
À SAVOIR
Selon un sondage réalisé par UFSBD (via le site Mutualité Française), plus d’un quart des Français (26 %) ne se brossent pas les dents au moins deux fois par jour.







