Une patiente accueillie dans un hôtel durant son séjour à l'hôpital.
Soumis à certaines conditions, l'accueil de patients à l'hôtel durant leur séjour à l'hôpital se généralise. © Freepik

Entre une chambre en hôtel quatre étoiles et une nuit à l’hôpital, le choix est vite fait, surtout lorsque le tarif est le même. Conséquence directe de l’une des mesures du Ségur de la Santé et, plus largement, de la généralisation de la prise en charge ambulatoire, le concept de l’hôtel hospitalier est en plein essor en France. Qui y a droit ? Comment en bénéficier ? Où trouver un hôtel hospitalier ? À quel prix ? Vincent Boisset, fondateur de la plate-forme lyonnaise My Hospitel, dévoile tous les bienfaits du dispositif pour les patients, bien sûr, mais aussi pour un système hospitalier en pleine mutation.

Un nombre de lits qui se réduit, une montée en puissance de l’ambulatoire… Face au bouleversement du paysage hospitalier français, un nouveau concept émerge en France pour favoriser l’hébergement des patients : l’hôtel hospitalier, ou hébergement temporaire non médicalisé (HTNM).

Le déploiement de ce dispositif est le fruit d’une expérimentation réussie réalisées dans 41 hôpitaux publics et privés du pays, conformément aux directives du dernier Ségur de la Santé. La plupart des hôpitaux et cliniques, aujourd’hui, développent ou souhaitent développer cette alternative à l’hospitalisation qui, bien sûr, ne s’adresse pas à tous les patients et fait l’objet de conditions et d’une réglementation bien précises.

Mais le manque de temps et de moyens peut-être un frein, qu’une start-up lyonnaise, My Hospitel, offre de lever grâce à sa plate-forme de gestion hospitalière sécurisée, comme l’explique son créateur Vincent Boisset, dont la solution, au-delà de séduire de plus en plus d’hôpitaux français, attise déjà la curiosité d’acteurs de la santé en Angleterre ou encore au Canada.

Quel est le rôle d’un hôtel hospitalier ?

Cela fait vingt ans que les hôpitaux proposent des solutions d’hébergement partielles à certains de leurs patients, soit dans une partie de leurs locaux, soit à proximité dans des hôtels partenaires avec lesquels ils ont négocié des tarifs préférentiels. Ces hébergements sont surtout destinés à des patients que ces hôpitaux doivent garder à proximité, qui habitent loin ou sont en difficulté sociale.

Ces patients ne devraient-ils pas être accueillis à l’hôpital ?

Des études diligentées par la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) ont démontré qu’un tiers des lits médicalisés étaient occupés à tort par des patients qui n’en ont pas vraiment besoin. La plupart habitent loin, et l’hôpital souhaite les rapprocher pour favoriser leur prise en charge. C’est le cas, par exemple, durant les parcours en oncolongie, où les patients sont amenés à multiplier les aller-retours entre leurs séances de chimiothérapie. Mais c’est aussi vrai pour de très courts séjours : un parcours ambulatoire sur deux nécessite une nuit en préambulatoire, les patients étant souvent convoqués très tôt le matin.

L’avenir de l’hôpital, face à la réduction du nombre de lits, est donc bien de permettre aux patients d’être hébergés à l’hôtel pour favoriser une meilleure prise en charge. Et ce d’autant que le nombre de patients ne cesse d’augmenter, du fait du vieillissement de la population.

Où en est actuellement en France le déploiement de l’offre d’hôtel hospitalier ?

Après une période de test menée en lien avec une quarantaine d’établissements, la DGOS et l’Assurance maladie ont décidé d’inciter au déploiement général du principe, en mettant en place un remboursement de 80€ forfaitaire par nuit à l’hôtel, payé à l’hôpital et donc sans frais pour le patient.

Il s’agit de l’une des mesures du Ségur de la santé en vue de réaliser des économies, en diminuant les coûts de l’hôtellerie pour l’hôpital. Charge aux hôpitaux de déployer ce dispositif, mais sans solution adaptée, et c’est cette solution que nous sommes venus apporter, à travers notre plate-forme My Hospitel.

On parle ici d’un marché potentiel en France d’un peu plus de dix millions de nuitées par an, à l’horizon 2030. Il s’agit d’un circuit très réglementé, avec des hôtels conventionnés par l’ARS, des hébergements sur prescription médicale…

Quel est le principe de la solution My Hospitel ?

My Hospitel est une sorte d’agence de voyage dédiée à l’hôtel hospitalier. Le principe est simple : nous vendons un abonnement à l’hôpital, et 80% du coût est supporté par l’hôtel, qui nous reverse une commission fixe de 10€. Les hôteliers, du coup, sont largement séduits : à titre d’exemple, lors des JO de Paris, nous avions des patients logés dans des hôtels à 80€ la nuit, malgré l’affluence.

Mais s’ils nous conservent des chambres à ce tarif, c’est aussi qu’ils y trouvent leur intérêt, puisque cela leur garantit un taux de remplissage minimum tout au long de l’année. Et nous parlons principalement d’établissements de trois ou quatre étoiles, confortables, bien équipés et bien situés.

Comment cela fonctionne-t-il pour le patient ?

Le gros de notre travail est d’intégrer l’hôtel dans le parcours du patient, avec une notion de proximité : l’idée est de rapprocher le patient à moins de 30 minutes de l’hôpital. Et nous développons également des services complémentaires, comme du transport. Le patient, sur le site, choisit son hébergement et les services dont il a besoin. Il peut opter pour un hôtel avec ou sans reste à charge. Certaines mutuelles, d’ailleurs, commencent à rembourser la différence.

À terme, nous réfléchissons également à développer une offre pour accompagner les aidants, car il y a aussi une forte demande. C’est une piste, car pour l’instant leur hébergement ne fait pas l’objet de remboursement.

Quels sont les hôpitaux partenaires de My Hospitel, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes ?

Nous avions deux hôpitaux sous contrat fin 2022, nous en avons 31 en janvier 25, dont vingt nouveaux intégrés durant le dernier trimestre 2024. Nous sommes en discussion avec 115 établissements, dans 14 région, de toutes tailles, publics comme privés.

Parmi les hôpitaux récemment intégrés figurent notamment l’hôpital Mermoz, à Lyon, le centre hospitalier de Chalon-sur-Saône, le Centre Hospitalier Métropôle Savoie à Chambéry et Aix-les-Bains, mais aussi notre tout premier CHU partenaire, celui de Nice. Et nous avons bon espoir de voir celui de Grenoble, ainsi que les Hospices Civils de Lyon, nous rejoindre prochainement. Ce CHU de Nice nous a envoyé très vite un afflux massif de nuitées, propre à conforter notre positionnement et notre modèle économique.

Quels sont les principaux avantages ?

Le besoin est réel et grandissant : qui, aujourd’hui, souhaite dormir à l’hôpital quand il est en capacité d’être logé à l’hôtel, à proximité ? Personne. Cette solution multiplie les avantages : c’est déstressant, c’est moins cher pour tout le monde, cela soulage le travail des personnels hospitaliers, les patients peuvent venir avec leurs familles…

My Hospitel est née avant tout pour améliorer le confort du patient, avec le meilleur hôtel possible, sans reste à charge. Dans les cas de séjours longs, mais il faut savoir que les limites sont larges, puisque si la limitation réglementaire est de 21 nuits successives, certains patients, venus par exemple des DOM-TOM, peuvent rester jusqu’à 40 nuits à l’hôtel.

Quel est le profil des patients concernés ?

Le patient qui vient très tôt à l’hôpital le matin, opéré très tôt en ambulatoire et qui habite loin. Il n’a pas besoin d’un lit médicalisé pour passer la nuit précédente, et l’hôtel lui convient très bien. Il y a aussi des patients en parcours d’examen ou opératoires, que l’on préfère garder la nuit suivante à proximité, par crainte de complications ou pour contrôler un pansement en post-opératoire… Il y a aussi tous les parcours de soins nécessitant des contrôles réguliers, des rééducations, etc.

À SAVOIR

My Hospitel, mise en valeur par le Club de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes à l’occasion de son dernier petit-déjeuner dédié à l’innovation, le 8 janvier 2025 à Lyon, a lancé son aventure en 2020 via l’incubateur à start-ups du Groupe Orange, à Rennes. L’entreprise réunit huit collaborateurs et son siège se situe à Lyon. Son chiffre d’affaires, qui s’élevait à 80 000€ en 2024, va atteindre 250 000€ en 2025 et devrait grimper à 1 million d’€ en 2025. La société a effectué plusieurs levées de fonds pour financer son développement. Son objectif est de parvenir à l’équilibre en 2026.

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Ma Santé

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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