Un tatoueur est en train de tatouer le bras d'une femme avec des encres industrielles.
C'est un fait désormais établi : les encres tatouages sont toxiques et potentiellement cancérigènes. © Adobe Stock

Longtemps cantonné à une image marginale, le tatouage s’est imposé comme un phénomène de société. Près d’un Français sur cinq arbore désormais un motif gravé à l’encre sous la peau. Mais derrière cet art corporel en pleine expansion, des questions émergent : les substances injectées sont-elles sans danger ? Et surtout : tatouage et cancer font-ils bon ménage ?

Fini le temps où le tatouage était réservé aux marins ou aux rebelles. En 2025, il s’affiche sur tous les profils : mères de famille, cadres dynamiques, retraités, étudiants… Selon une enquête IFOP, 20 % des Français sont tatoués, et ce chiffre grimpe à 30 % chez les 25-34 ans. Une démocratisation fulgurante.

Mais ce geste symbolique ou esthétique n’est pas sans soulever d’interrogations. Depuis plusieurs années, les scientifiques alertent sur les composants chimiques des encres, dont certains pourraient poser des risques sanitaires graves, voire être cancérogènes. Alors, faut-il s’inquiéter ? 

Des substances issues… de l’industrie

Ce que peu de gens savent, c’est que la majorité des pigments utilisés dans les encres de tatouage n’ont pas été conçus pour un usage médical ou dermatologique, mais pour… l’industrie. On les retrouve dans les peintures, les plastiques ou encore les encres d’imprimerie.

Parmi les substances les plus fréquemment identifiées :

  • Des métaux lourds comme le plomb, le mercure ou le nickel.
  • Des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), surtout présents dans les encres noires. Or, plusieurs HAP sont classés cancérogènes probables par le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer).
  • Des amines aromatiques, suspectées d’altérer l’ADN.

Et le constat est préoccupant : selon un rapport de l’ECHA (Agence européenne des produits chimiques), un quart des encres analysées contiennent des substances présentant un risque élevé pour la santé humaine.

Un lien avec le cancer ? 

À ce jour, aucune étude n’a établi de lien direct et irréfutable entre tatouage et cancer. Mais plusieurs signaux faibles interpellent les chercheurs.

  • Les pigments peuvent migrer dans l’organisme, en particulier vers les ganglions lymphatiques, où ils s’accumulent.
  • Certains cas de lymphomes cutanés, de mélanomes ou de sarcomes ont été recensés près de zones tatouées. Des études de cas existent, mais le lien de causalité reste à prouver.
  • Le vrai problème, selon les experts, c’est le manque de recul. “On parle d’encres injectées à vie sous la peau, contenant parfois des substances toxiques. Comment ne pas s’interroger ?”, note un dermatologue interrogé par Le Progrès.

Une réforme salutaire, mais encore incomplète

Depuis janvier 2022, la législation européenne a franchi un cap, via l’application du règlement REACH. Objectif : interdire plus de 4 000 substances dangereuses dans les encres de tatouage et renforcer la traçabilité.

En France, c’est l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) qui veille au grain. Les fabricants doivent désormais fournir la liste complète des ingrédients, et les professionnels du tatouage doivent respecter des normes d’hygiène strictes. Mais les autorités restent prudentes. “Il faudra du temps pour évaluer les effets à long terme de ces pigments dans l’organisme”, rappelle Santé Publique France.

Les vrais risques avérés du tatouage

En attendant des preuves formelles sur le cancer, d’autres effets indésirables sont bien connus :

  • Des réactions allergiques sévères, surtout avec les encres rouges (eczéma, démangeaisons persistantes),
  • Des infections bactériennes ou virales, en cas d’hygiène défaillante (hépatite B, C, staphylocoques),
  • Des cicatrices hypertrophiques, parfois difficiles à traiter.

Alors, non, on ne peut pas affirmer aujourd’hui que le tatouage provoque le cancer. Mais le principe de précaution s’impose, tant les encres utilisées peuvent contenir des substances potentiellement nocives.

Avant de franchir le pas, il est légitime de s’informer. Car si le tatouage est une œuvre d’art, la santé, elle, ne connaît pas les retouches.

À SAVOIR

Des chercheurs ont mené une étude sur 2 367 jumeaux danois, complétée par une analyse cas-témoins sur 316 autres, tous nés entre 1960 et 1996. En croisant les données du registre national du cancer avec celles de l’enquête danoise sur les tatouages (2021), ils ont observé que les participants portant un tatouage plus grand que la paume de la main présentaient un risque 2,4 fois plus élevé de cancer de la peau et 2,7 fois plus élevé de lymphome.

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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