Le Vinatier ne connaîtrait-il pas la crise ? L’hôpital psychiatrique lyonnais, à travers son projet Cap 28, déploie en effet ses ailes pour devenir l’un des principaux pôles d’excellence européens de la discipline. Cette ambition, qui s’appuie sur une attractivité sans égale en matière de recrutement, se traduit également par la réorganisation d’une offre de soins résolument plus pertinente, accessible et personnalisée, susceptible de répondre à des besoins en santé mentale qui ne cessent de s’alourdir dans notre pays.
La santé mentale a été décrétée grande cause nationale en 2025 en France. Un choix judicieux, tant le mal-être des Français s’est accentué depuis la crise sanitaire. Dans ce contexte, l’hôpital du Vinatier de Lyon-Bron (officiellement Le Vinatier Psychiatrie Universitaire Lyon Métropole), semble particulièrement bien armé pour répondre à ce qui est clairement devenu, en quelques années, un enjeu de santé publique.

Alors que l’immense majorité des établissements publics du pays souffrent d’une pénurie de soignants sans précédents, le Vinatier, lui, tient étonnament la barre. Son directeur, Pascal Mariotti, réfute même clairement les mots de “crise” ou de “tension”, à l’heure d’évoquer les effectifs. Tout juste consent-il à pointer quelques “difficultés” épisodiques, sans conséquences dans le fonctionnement d’un établissement parvenu, à l’aube de son projet Cap 28, à rétablir une démographie médicale optimale, ce qui est suffisamment rare pour être souligné.
“Nous avons revu toutes nos bases de recrutement, y compris chez les jeunes médecins. (Cette stratégie) a permis au Vinatier de revenir au plein-emploi, y compris pour les infirmiers, dès la mi-2024”, livre-t-il.
Cette politique de recrutement, doublée “d’une montée en compétence des équipes”, est l’un des fondamentaux du projet d’établissement du Vinatier. Cap 28 vise en effet un redéploiement complet, d’ici 2028, de l’offre de soins autour de modèles exemplaires et innovants, partagés et copiés par d’autres hôpitaux et faisant du Vinatier “l’un des grands centres hospitaliers psychiatriques d’Europe”.
Une offre de soins psychiatrique redéployée pour répondre à tous les besoins
“Il n’y a pas, en France, de politique publique relative à l’offre de soins en psychiatrie publique”, témoigne le Dr Frédéric Meunier, président de la commission médicale d’établissement (CME) du Vinatier. Et “cette offre de soins”, poursuit le psychiatre, “ne correspond actuellement pas à l’intégralité de l’attente”.
Parallèlement à la formation de ses équipes à de nouveaux besoins (TDA/H, borderline, troubles psychotraumatiques…), le Vinatier a donc entamé un processus de réorganisation de son accès aux soins, afin de garantir des prises en charges plus pertinentes, précoces et personnalisées.
Cette démarche s’est concrétisée par l’ouverture en novembre dernier de la première unité en France entièrement dédiée aux personnes autistes, ou encore par la création en décembre d’un service d’addictologie.
Les urgences psychiatriques, désormais susceptibles d’accueillir des patients 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, ont fait l’objet d’une réorganisation menée en lien avec celles des établissements voisins (Édouard-Herriot pour les adultes, HFME pour les enfants). Avec à la clé une régulation plus efficiente, un meilleur accès aux soins non programmés et une meilleure fluidité en cas d’hospitalisation. “La mise en place du SAS Psy (SAS = service d’accès aux soins, NDLR) s’avère particulièrement probante, puisque 80% des patients vers les urgences sont en effet hospitalisés”, ajoute le directeur du site.
Un accès aux soins plus facile et cohérent
D’autres outils innovants révèlement aussi toute leur pertinence dans cette problématique d’accès aux soins à améliorer :
- la plate-forme téléphonique Live (0 805 05 05 69, numéro gratuit accessible 7j/7 de 8h à 20h), pour informer et orienter patients, familles et professionnels dre santé
- la ligne téléphonique POP (0 800 71 51 50, accessible du lundi au vendredi de 9h à 17h), ouverte aux enfants et adolescents
Ouvertes en 2023 sous la houlette du Vinatier, les antennes de la Maison de l’Enfant et de la Famille offrent un accueil et une écoute aux enfants de 3 à 11 ans, susceptibles de favoriser le dépistage de troubles éventuels dès le plus jeune âge.
Et ce maillage va prochainement s’étoffer avec l’ouverture, à l’entrée du Vinatier, d’une Maison Médicale de la Psychiatrie destinée à des consultations ne justifiant pas un passage par les urgences.
Le Vinatier doit faire connaître son offre de soins
Cet “arsenal” en mutation constante fait de la métropole de Lyon un pôle d’excellence sans comparaison en matière d’offre de soins psychiatriques. Qui souffre, toutefois, d’un certain manque de visibilité, comme le regrette Pascal Blanchard, vice-président de la Métropole de Lyon chargé à la santé : “le taux de service des établissements psychiatrique diminue partout en France, sauf au Vinatier, qui a pourtant besoin de notoriété pour ouvrir encore un peu plus ses ailes. Disposer d’un tel lieu d’excellence sur le territoire est extrêmement vertueux et il faut d’une part en soutenir le développement et d’autre part le faire savoir au plus grand nombre”.
L’un des objectifs de Cap 28 est justement d’améliorer les liens avec la médecine de ville, ne serait-ce que pour apporter une meilleure connaissance de l’offre de soins en psychiatrie vers laquelle les médecins généralistes et autres professionnels de santé pourraient réorienter leurs patients…
À SAVOIR
Le Vinatier regroupe 2 800 professionnels de santé, dont 225 personnels médicaux, qui prennent chaque année en charge 23 000 adultes et 7 000 enfants et adolescents sur une dizaine de pôles. Au total, ce complexe psychiatrique universitaire, le plus grand d’Auvergne-Rhône-Alpes et l’un de plus importants de France, dispose de 491 lits d’hospitalisation à temps complet, de 26 lits de médecine et de soins de suite, et de 239 places d’hôpital de jour. Au total, Le Vinatier dessert en proximité et sur son campus hospitalier de Bron une population de 850 000 habitants et plus de 50% des habitants de la Métropole de Lyon.