
L’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) vient de resserrer la vis face à la sédentarité. Ses nouvelles recommandations, publiées le 8 octobre 2025, invitent chaque Français à marcher 3 à 5 minutes toutes les 30 minutes passées assis. Une mesure simple en apparence, mais fondée sur des données scientifiques solides et une urgence sanitaire bien réelle.
L’ANSES alerte : « Faire du sport ne suffit plus ». Même une personne respectant les recommandations de l’OMS (150 minutes d’activité modérée par semaine) peut souffrir des effets néfastes de la sédentarité si elle reste trop longtemps assise sans bouger.
« La sédentarité est un facteur de risque indépendant de mortalité prématurée, de diabète de type 2, d’obésité et de maladies cardiovasculaires », souligne l’agence dans son avis du 8 octobre 2025.
Jusqu’ici, les recommandations françaises parlaient de se lever et marcher toutes les 1 à 2 heures. Désormais, le ton se durcit. Toutes les demi-heures, il faudrait se lever, marcher, ou simplement bouger quelques minutes pour « réactiver » son corps.
Bouger plus : pourquoi l’ANSES durcit ses recommandations ?
Cette nouvelle cadence n’a rien d’arbitraire. L’ANSES s’appuie sur une revue de plus de 75 études scientifiques publiées entre 2016 et 2025. Ces travaux montrent que rompre les périodes d’immobilité toutes les 30 minutes permet d’obtenir des effets mesurables sur :
- la régulation de la glycémie : les muscles sollicités captent mieux le glucose, évitant les pics de sucre ;
- la sensibilité à l’insuline, réduisant le risque de diabète ;
- la circulation sanguine, favorisant le retour veineux et limitant la stagnation dans les jambes ;
- la fatigue mentale et la concentration, grâce à une meilleure oxygénation du cerveau.
Une étude australienne, par exemple (Dunstan et al., Diabetes Care, 2022), a montré qu’une simple marche lente de 2 minutes toutes les 30 minutes diminue significativement la glycémie postprandiale comparée à une position assise continue. « Ces micro-pauses actives ont un effet tampon sur les désordres métaboliques liés à la position assise prolongée », précise le rapport de l’ANSES.
Sédentarité : le mal du siècle ?
Sédentarité : une urgence française
Selon Santé publique France, 8 adultes sur 10 passent plus de 3 heures par jour assis pour leurs loisirs, et plus de 20 % restent assis plus de 7 heures par jour. Le télétravail, les trajets motorisés et les loisirs numériques ont amplifié le phénomène. En France, la sédentarité touche désormais toutes les classes d’âge :
- chez les jeunes de 11 à 17 ans, 63 % ne respectent pas les recommandations minimales d’activité ;
- chez les adultes actifs, plus d’un sur deux dépasse les seuils de sédentarité quotidienne.
Ces comportements pèsent lourd sur la santé publique. L’OMS estime que la sédentarité est responsable d’environ 5 millions de décès évitables par an dans le monde.
Comment appliquer la règle des 30 minutes ?
Pas besoin de tapis de course au bureau. L’ANSES insiste sur la simplicité du geste : se lever, marcher, bouger les jambes ou faire quelques pas suffit déjà.
Au travail
- Mettre une alarme ou application qui rappelle de se lever toutes les 30 minutes ;
- Profiter d’un appel pour marcher en parlant ;
- Organiser des réunions debout ou « walk & talk » ;
- Alterner positions assises et debout avec un bureau réglable.
À la maison
- Pendant les séries ou les jeux vidéo : marcher ou s’étirer à chaque épisode ou pause ;
- Se lever pour boire un verre d’eau, faire quelques pas, aller chercher le courrier ;
- Pour les enfants : intégrer des pauses actives à la maison ou à l’école.
Ces mini-ruptures, répétées tout au long de la journée, peuvent cumuler jusqu’à 40 minutes d’activité légère supplémentaire par jour, un gain non négligeable.
Sédentarité : ce que la science ne dit pas (encore)
Si le consensus scientifique se renforce, certaines zones d’ombre persistent. Les chercheurs n’ont pas encore déterminé :
- le rythme optimal exact (toutes les 30, 45 ou 60 minutes ?) ;
- la durée minimale efficace de chaque pause ;
- ni l’impact à long terme sur la mortalité toutes causes confondues.
Mais le message reste clair. L’immobilité prolongée est nocive, et toute interruption compte. « Il vaut mieux trois minutes de marche que trente minutes d’inactivité », résume la physiologiste Martine Duclos, professeure au CHU de Clermont-Ferrand, spécialiste de la sédentarité.
Attention, ce n’est pas un substitut à l’exercice régulier
Attention, ces pauses ne remplacent pas une activité physique régulière. Les repères du Programme national nutrition santé (PNNS) restent valables :
- 150 à 300 minutes d’activité d’endurance modérée (marche rapide, vélo, natation) par semaine ;
- renforcement musculaire au moins deux fois par semaine.
Les deux approches sont complémentaires : bouger souvent préserve le métabolisme ; bouger intensément entretient la forme physique.
Bouger plus : un changement culturel à amorcer
Ces recommandations posent aussi une question sociale : comment bouger plus souvent dans un monde conçu pour rester assis ? Dans les bureaux, les open spaces ou les écoles, les habitudes devront évoluer. L’enjeu est autant collectif qu’individuel. Il faut repenser les espaces, les rythmes et la façon dont on conçoit la “productivité”.
Certaines entreprises françaises, comme Décathlon ou Airbus, testent déjà des pauses actives collectives et des bureaux dynamiques. Les premiers retours sont positifs : meilleure concentration, moins de fatigue, plus d’interactions.
À SAVOIR
Selon Santé publique France, la sédentarité serait responsable d’environ 40 000 décès chaque année dans l’Hexagone, soit près de 7 % de la mortalité totale.







