Une infirmière puéricultrice avec une maman et son bébé.
Les infirmières puéricultrices sont des maillons essentiels de la chaîne du soin du nourrisson. © Freepik

Alors que la mortalité infantile augmente en France, l’ANPDE (Association Nationale des Puéricultrices Diplômées et des Étudiants) tire la sonnette d’alarme. Dans un communiqué publié le 17 avril 2025, l’association dénonce un manque massif de professionnelles formées, des services sous tension, et une formation en déclin. Face à une situation confinant au péril sanitaire, l’ANPDE appelle les pouvoirs publics à réagir d’urgence.

Depuis 2011, la France connaît une hausse progressive de sa mortalité infantile, avec 4,1 décès pour 1 000 naissances vivantes en 2024, selon l’INSEE. Un chiffre préoccupant, désormais supérieur à la moyenne européenne, qui questionne la qualité de l’accompagnement des jeunes enfants et des familles.

Dans ce contexte, l’ANPDE a publié un communiqué officiel au ton inhabituellement grave, alertant sur la pénurie d’infirmières puéricultrices (IPDE). “Imaginez un pays où, chaque jour, plus de 7 bébés meurent. Un pays qui serait le mauvais élève de la mortalité infantile… N’imaginez plus. Vous y êtes. La France. 2025. Un pays qui laisse mourir ses bébés en silence. Un pays qui regarde les chiffres de la mortalité infantile grimper… et détourne les yeux. Comment en sommes-nous arrivés à ce niveau d’indifférence ?”

Ces professionnelles (ce sont dans l’immense majorité des femmes), pourtant au cœur du dispositif de prévention et de suivi en petite enfance, sont de moins en moins nombreuses. Et ce déficit humain, invisible mais bien réel, pourrait avoir des conséquences directes sur la santé des nourrissons.

Les infirmières puéricultrices sont des professionnelles de santé spécialisées dans le suivi médical, social et psychologique des enfants de 0 à 18 ans, avec une expertise particulière dans les premiers mois de vie. Elles interviennent dans les services hospitaliers pédiatriques et néonataux, les PMI (Protection Maternelle et Infantile), les crèches et au sein des maternités.

Pourtant, selon l’ANPDE, le nombre de diplômées diminue drastiquement : seulement 489 diplômées en 2023, contre plus de 1 000 il y a dix ans. Le nombre d’écoles diminue lui aussi, passant de 39 en 2013 à seulement 25 aujourd’hui.

Dans ce communiqué intitulé “Un monde sans puéricultrices ?”, l’ANPDE interpelle directement les autorités sanitaires. “À force d’ignorance, de mépris, de choix politiques absurdes, on est en train de saborder la spécialité d’infirmière puéricultrice. Pourquoi ? Parce que ce n’est pas rentable. Parce que la prévention ne fait pas gagner d’élections !”

L’association décrit une profession essentielle mais sacrifiée, en raison d’un manque de reconnaissance institutionnelle, de perspectives professionnelles limitées, et d’une formation initiale inchangée depuis plus de 40 ans.

L’association relie clairement cette pénurie à la hausse de la mortalité infantile, notamment dans les premières semaines de vie, où la présence d’un personnel formé est déterminante. Le manque de suivi postnatal, l’abandon progressif de certaines missions de PMI et les difficultés à orienter les familles fragiles sont autant de défaillances systémiques qui mettent en péril la santé des plus jeunes.

Ce déficit de puéricultrices n’est pas sans conséquence. Dans les PMI, les visites médicales obligatoires pour les enfants sont souvent reportées, voire annulées, faute de personnel. En crèche, l’encadrement des bébés par des IPDE devient exceptionnel. Et dans les services hospitaliers, les infirmières généralistes doivent parfois gérer des situations pédiatriques complexes sans spécialisation.

Ce manque fragilise tout le parcours de santé de l’enfant, de la naissance à la petite enfance : dépistages retardés, problèmes de nutrition non repérés, troubles du développement laissés sans suivi. “Qui pour repérer les écarts de développement, les troubles moteurs ou du langage, les handicaps silencieux, les problèmes de santé passés sous les radars ?”

Cela empêche également la prévention des accidents domestiques, des syndromes de mort inattendue du nourrisson ou du bébé secoué, ou encore le soutien à l’allaitement — autant de facteurs pourtant identifiés comme clés dans la réduction de la mortalité infantile.

Face à cette urgence, l’ANPDE formule plusieurs recommandations :

  • Une revalorisation statutaire et salariale du métier,
  • Une réforme de la formation, actuellement en décalage avec les besoins de terrain,
  • Le développement de postes fléchés IPDE, notamment en PMI,
  • Une meilleure communication autour de la profession pour relancer les vocations.

Ces demandes ne sont pas nouvelles, mais le contexte démographique et sanitaire les rend aujourd’hui impossibles à ignorer. Pour l’ANPDE, la disparition progressive des puéricultrices est un choix politique par défaut, aux conséquences durables.

À SAVOIR

Fondée en 1947, l’ANPDE (Association Nationale des Puéricultrices Diplômées et des Étudiants) est la principale organisation représentative des infirmières puéricultrices en France. Elle défend la reconnaissance de la spécialité, œuvre pour l’amélioration des conditions d’exercice et milite pour une réforme de la formation. Présente dans toute la France, l’ANPDE est aujourd’hui une voix incontournable dans les débats sur la santé infantile et la petite enfance.

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Ma Santé

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

1 COMMENTAIRE

  1. pas un seul mot sur les réformes de la t2a et de la carte hospitalière de sarkozy ?

    c’est pourtant à lui qu’on doit la fermeture d’une maternité sur 4 en france ces 20 dernières années, c’est à lui qu’on doit le retour de de la mortalité des parturientes en couche non compliquée, c’est à lui qu’on doit de nouveaux des morts à causes de maladies qui n’avaient plus tué depuis la seconde guerre mondiale …

    y a encore 35 ans on avait les meilleurs hôpitaux du monde, les meilleures routes et trains aussi, les meilleurs écoles et facultés aussi, le meilleur programme spatial et le meilleur niveau de vie moyen du monde aussi … puis la droite est passée par là …

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