Des activités physiques adaptées pratiquées par des patients atteints de maladies rénales.
"Bouge ton rein améliore la vie des personnes touchées par la maladie rénale ainsi que leur entourage". © Freepik

En France, les maladies rénales chroniques touchent environ 10% de la population avec un diagnostic souvent tardif. Face à cette réalité, une initiative beaujolaise fait bouger les lignes de la prise en charge des pathologies rénales. L’association Bouge ton rein, créée par une équipe de soignants du service de néphrologie de l’Hôpital Nord-Ouest de Villefranche-sur-Saône, propose des activités physiques adaptées et des ateliers diététiques pour améliorer la qualité de vie des patients. À sa tête, Patricia Rudelli, diététicienne-nutritionniste spécialisée en néphrologie, nous éclaire sur les missions et les bienfaits de cette initiative.

Elle avance à pas feutrés, sans douleur, sans bruit. Et puis un jour, le diagnostic tombe : vos reins fatiguent, parfois même jusqu’à l’épuisement. L’insuffisance rénale chronique, c’est un peu la maladie qu’on ne voit pas venir et qui concerne pourtant près de 6 millions de personnes en France. Un chiffre colossal… pour un mal dont on parle si peu.

Mais dans le Beaujolais, une petite équipe a décidé de secouer un peu les idées reçues et les patients aussi, au passage. L’association Bouge ton rein, lancée en 2023, propose aux personnes atteintes de pathologies rénales de remettre du mouvement dans leur quotidien. Littéralement. Ateliers de marche nordique, cuisine adaptée, moments de respiration et de lien : ici, on soigne autrement. Et c’est Patricia Rudelli, diététicienne-nutritionniste et présidente de l’association, qui nous explique l’importance du mouvement pour mieux vivre.

“Notre objectif, c’est d’ajouter de la santé à la maladie”

Créée début 2023 par une équipe de soignants du service de néphrologie de l’Hôpital Nord-Ouest de Villefranche-sur-Saône, l’association Bouge ton rein ne prétend pas révolutionner le monde, mais elle transforme déjà bien des quotidiens. “On est partis d’un constat simple. Nos patients souffrent d’isolement, d’incompréhension, de contraintes alimentaires lourdes. On voulait leur offrir une bulle d’oxygène”, raconte Patricia Rudelli. Le projet a pris forme autour d’un noyau soudé : Patricia à la présidence, Marie-Claude Crétin, patiente et trésorière, Ameline Baret, infirmière spécialisée et secrétaire, Nelly Hermann, vice-secrétaire et également patiente, et le Dr Cécile Teuma, néphrologue très impliquée.

L’ambition est claire : proposer des activités physiques adaptées, des temps d’échange, des ateliers diététiques pour sortir les patients de leur maladie, ou du moins de son emprise totale. “Ce qu’on veut, c’est redonner un peu de mouvement, de lien, et de plaisir à des personnes qui en manquent cruellement”, explique Patricia.

Bouger pour survivre… et pour mieux vivre

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, l’insuffisance rénale n’est pas un problème de reins uniquement. C’est tout le corps et souvent l’esprit qui trinque. Et là, l’activité physique devient un levier essentiel. “L’activité physique améliore les constantes biologiques, la tension, le poids… mais surtout, elle fait du bien au moral”, insiste Patricia.

Mais ces recommandations ne restent pas théoriques. Des ateliers de marche nordique, de pilates ou de sophrologie sont proposés. Les patients sortent, se parlent, respirent. “C’est aussi sortir du rôle de malade”, souligne Patricia. “Et ce n’est pas rien.”

Manger pour se soigner… sans se punir

Bien manger, dit-on. Mais dans les maladies rénales, c’est bien plus compliqué que cela. “On entend tout et n’importe quoi”, soupire Patricia Rudelli. “Certains patients s’interdisent des aliments sans raison, d’autres mangent sans savoir que ça aggrave leur état. Il faut remettre du bon sens, du plaisir, et surtout, de la personnalisation.”

À travers des ateliers cuisine, des pique-niques, voire des barbecues adaptés, l’association propose une autre approche de l’alimentation thérapeutique. Pas question ici de diaboliser ou de frustrer. “On adapte les recettes, on apprend à doser, à contourner les restrictions tout en gardant le goût”, explique Patricia.

Marie-Claude, patiente et membre de l’association BTR, témoigne : “Pour moi, l’association est à la fois utile et vraiment agréable. Elle permet de rencontrer des personnes de tous âges, de parler avec d’autres patients, mais aussi d’échanger avec les soignants, néphrologue, diététicienne, infirmières, dans un cadre différent de l’hôpital. On partage nos expériences, on fait ensemble des activités comme la cuisine ou le sport, on échange des recettes… En fait, on construit des projets de vie, tout en continuant à prendre soin de soi, à parler alimentation, hydratation, dialyse, greffe et même don d’organes…”

Une maladie silencieuse, mais qui crie si on ne l’écoute pas

L’insuffisance rénale chronique touche environ 10 % de la population française selon Santé Publique France. Et pourtant, peu de gens savent vraiment ce que c’est. “C’est l’oubliée des maladies chroniques”, constate Patricia. “Parce qu’elle ne fait pas mal, parce qu’on ne voit rien, on ne s’en occupe pas. Et souvent, quand les symptômes apparaissent, il est trop tard.”

C’est pour cela que l’association s’engage aussi dans la prévention. Lors de la Semaine du Rein, l’association a mis en avant le dépistage précoce des maladies rénales. Dans le même temps, l’hygiène de vie, l’hydratation et le don d’organes ont été abordés. Car oui, “on est tous donneurs, sauf si on s’y oppose. Mais encore faut-il en parler autour de soi. !” appuie le Dr Teuma.

Et là, encore, le mouvement est important : “Une bonne hygiène de vie, c’est de l’activité physique régulière, une alimentation adaptée, et une hydratation d’au moins 1,5 litre par jour”, insiste le Dr Teuma.

80 % des cerveaux dénutris : quand le rein tire aussi la sonnette d’alarme du cerveau

Vous ne le saviez peut-être pas, mais selon l’Anses, près de 80 % des Français seraient en situation de dénutrition cérébrale. En cause, des carences en oméga-3, en vitamines B, en magnésium… qui affectent la mémoire, l’humeur, la concentration. Des faiblesses plus qu’handicapantes, surtout chez des patients déjà fragilisés.

“Les malades du rein ne mangent pas toujours bien, parce qu’ils ont des restrictions. Mais parfois, ils évitent trop, ou mal, et se retrouvent en carence de nutriments essentiels pour le cerveau. C’est un cercle vicieux : moins d’énergie, plus d’anxiété, moins de motivation…”, détaille Patricia Rudelli.

D’où l’importance, une fois encore, de la personnalisation, et d’un accompagnement par des professionnels formés en néphrologie. “On ne peut pas prescrire le même régime à tout le monde. Ce serait dangereux”, martèle la diététicienne.

Une association locale, mais pas une initiative anecdotique

À ce jour, Bouge ton rein reste modeste. “On n’a pas les reins assez solides pour s’étendre au niveau national”, reconnaît Patricia dans un sourire. 

“On est une poignée à faire vivre l’association. On rêve juste d’aider nos patients au mieux. Et pourquoi pas se faire connaître dans un rayon de 20 km autour de Villefranche. Ce serait déjà énorme.”

Le mot de la fin

Quand on demande à Patricia Rudelli ce qu’elle aimerait dire aux lecteurs, elle répond sans hésiter : “Que les maladies rénales existent. Qu’on peut les prévenir. Et surtout, qu’on peut vivre avec, autrement. Pas juste survivre, mais vraiment vivre.”

Et ça, croyez-le ou non, ça commence souvent par une marche dans les vignes, un atelier cuisine ou une discussion bienveillante avec quelqu’un qui sait ce que vous vivez. 

À SAVOIR 

Le samedi 10 mai 2025, de 10h à 11h30, l’association Bouge ton rein propose un atelier intitulé “Terre de Sienne”. Un moment convivial et ludique pour prendre soin de soi tout en mettant en valeur sa beauté naturelle. Pour réserver votre place, rendez-vous sur la page Facebook de Bouge Ton rein.

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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