Une femme qui consomme du xanax, un médicaments de la famille des benzodiazépines.
Les benzodiazépines sont prescrites en ville majoritairement par 75 % généralistes et 10 % psychiatres. © Adobe Stock

À partir d’aujourd’hui, jeudi 10 avril 2025, l’ANSM lance une nouvelle campagne nationale pour alerter sur les dangers liés à la consommation excessive de benzodiazépines. Des médicaments souvent utilisés contre l’anxiété et les troubles du sommeil. Souvent prescrits trop longtemps, ils peuvent pourtant devenir problématiques, notamment en raison des risques de dépendance et d’effets secondaires. Décryptage.

C’est un signal fort que lance l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). À travers sa campagne de prévention 2025, plus ciblée que les précédentes, l’organisme souhaite faire évoluer les pratiques autour des benzodiazépines et sensibiliser le grand public. Mais aussi et surtout les professionnels de santé sur les dangers d’une consommation mal encadrée. Notamment, “une recrudescence des accidents de la route dû à une prise incontrôlée de benzodiazépines” déclare Dr. Philippe Vella, Directeur des médicaments neurologiques à l’ANSM.

Mais pourquoi maintenant ? Parce que plus de 9 millions de Français ont été traités par benzodiazépines en 2024. Et parce que la France se classe deuxième pays le plus consommateur en Europe, juste après l’Espagne​. Or, ces traitements ne sont pas sans risque, surtout lorsqu’ils sont utilisés trop longtemps.

Et, bien que “la macro-consommation soit en baisse depuis ces dix dernières années, la consommation ciblée chez les jeunes, elle, augmente de manière inquiétante” rappelle Le Pr Catherine Paugam-Burtz, directrice générale de l’ANSM.

Des médicaments banalisés

Derrière ce nom un peu barbare se cachent des médicaments très courants comme le Xanax® (alprazolam), le Lexomil® (bromazépam), le Temesta® (lorazépam) ou encore les somnifères comme Stilnox® (zolpidem) et Imovane® (zopiclone).

Ces molécules, disponibles depuis les années 60, agissent sur le système nerveux central. Elles calment, apaisent, facilitent l’endormissement. En somme, elles font du bien… à court terme. Mais attention, elles n’agissent que sur les symptômes, pas sur les causes profondes de l’anxiété ou des troubles du sommeil. “Ce sont des béquilles, pas des solutions de fond” insiste Philippe Vella, Directeur des médicaments neurologiques à l’ANSM.

Des risques bien réels, surtout avec le temps

Le message de l’ANSM est clair : la durée de traitement doit rester courte !

Plus on prend ces médicaments longtemps, plus le risque de dépendance augmente. Et ce n’est pas le seul danger : pertes de mémoire, somnolence, chutes chez les personnes âgées, troubles de la concentration… la liste est longue. Sans oublier que la consommation d’alcool en parallèle aggrave les effets secondaires​.

Autre information marquante : 40 % des patients traités dépassent les durées recommandées. Soit 3,6 millions de Français en 2024 étaient concernés par une prescription trop longue​. 

Des publics plus exposés que d’autres

La campagne cible trois groupes en particulier :

  • Les jeunes (18-25 ans) : un quart d’entre eux avouent ignorer les risques de dépendance ou les dangers liés à la conduite ou à l’utilisation de machines sous traitement​.
  • Les seniors (65 ans et plus) : ils sont les plus gros consommateurs. Avec l’âge, les effets indésirables sont plus fréquents, notamment les chutes qui peuvent avoir des conséquences graves.
  • Les professionnels de santé : médecins généralistes, psychiatres, pharmaciens… Tous sont invités à mieux encadrer les prescriptions et à informer davantage leurs patients.

Professionnels de santé et patients : un appel au bon usage

Pour toucher un maximum de monde, l’ANSM mise sur des affiches, des brochures, des vidéos, mais aussi des partenariats avec des influenceurs santé comme le YouTubeur WhyDoc. Le contenu sera diffusé sur les réseaux sociaux, dans la presse en ligne, et même dans les taxis et VTC des grandes villes​. Aussi, toujours dans cette volonté de réguler la consommation, la mise en place de petits conditionnements de 5 à 7 comprimés pour les benzodiazépines hypnotiques.

Alors, en pratique, patients et professionnels de santé sont appelés à avoir les bons réflexes pour un usage responsable :

  • Suivre strictement la prescription : ne jamais augmenter les doses ni prolonger le traitement sans avis médical.
  • Ne pas banaliser ces médicaments : ils soulagent mais comportent des risques importants (dépendance, accidents…).
  • Signaler systématiquement sa consommation de benzodiazépines à chaque professionnel de santé consulté (médecin traitant, spécialiste, pharmacien…), surtout pour les femmes enceintes ou en cas d’autres traitements en cours.
  • Ne pas associer benzodiazépines et alcool (ni drogues ou autres sédatifs) : la combinaison peut être dangereuse.
  • Préparer l’arrêt à l’avance avec son médecin : un sevrage planifié et progressif évitera l’effet rebond et le syndrome de sevrage.
  • Pour les médecins : prescrire la plus petite dose efficace pour la plus courte durée, et seulement en cas de nécessité absolue (anxiété sévère, insomnie aiguë). Prendre le temps d’écouter le patient, d’évaluer les autres solutions et de bien informer sur les risques.

Des alternatives à explorer avant les médicaments

Et si on essayait autre chose avant de passer par la case pilule ? La campagne de l’ANSM met en avant plusieurs solutions non médicamenteuses :

Pour l’insomnie :

Pour l’anxiété :

L’idée ? Reprendre le contrôle sur son sommeil ou son stress sans devenir dépendant à un médicament. Et Elodie Massé, Directrice de la communication de l’ANSM, insiste sur cette signature qui ne manquera pas de marquer les esprits : “Les médicaments ne sont pas des produits ordinaires. Ne les prenons pas à la légère.”

À SAVOIR

Les femmes, davantage exposées à la consommation de benzodiazépines. Selon une étude de l’Assurance maladie (rapport 2023), les femmes représentent près de 65 % des consommateurs de benzodiazépines en France. Cette surreprésentation s’expliquerait par une plus grande fréquence des troubles anxieux et de l’insomnie dans la population féminine, mais aussi par des stéréotypes encore présents dans certaines pratiques médicales.

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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