Une collégienne en dépression, seule et isolée.
Plus d’un quart des départements français sont considérés comme des "déserts médicaux" en pédopsychiatrie selon Santé Publique France. © Adobe Stock

Stress scolaire, pression sociale, addiction aux écrans, harcèlement… Les jeunes d’aujourd’hui, encore plus depuis le début d’une crise sanitaire anxiogène, font face à une charge mentale écrasante, et leur santé en pâtit. Près d’un quart des lycéens ont eu des pensées suicidaires en un an, un chiffre glaçant qui révèle une détresse profonde (EnCLASS 2022). Pourtant, trop peu d’entre eux osent demander de l’aide. Pourquoi les adolescents souffrent-ils autant ? Comment mieux les accompagner ? Décryptage.

La santé mentale des jeunes est devenue un enjeu majeur de santé publique. Anxiété, dépression, pensées suicidaires… Les chiffres récents témoignent d’un véritable malaise chez les collégiens et lycéens, et ce d’autant plus depuis le début de la crise sanitaire.

Selon l’étude nationale EnCLASS 2022, 14 % des collégiens et 15 % des lycéens présentent un risque élevé de dépression, tandis que 24 % des lycéens déclarent avoir eu des pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois. Pire encore, 13 % ont déjà fait une tentative de suicide au cours de leur vie.

Face à cette détresse, une question s’impose : pourquoi les jeunes vont-ils si mal ? Stress scolaire, pression sociale, harcèlement, réseaux sociaux… De nombreux facteurs contribuent à cette crise silencieuse. 

Santé mentale des jeunes : une crise aggravée par la pandémie ?

Les signaux d’alerte ne datent pas d’hier. Depuis plusieurs années, les études montrent une augmentation des troubles psychiques chez les adolescents. Mais la pandémie de COVID-19 a agi comme un accélérateur. Confinements, isolement, incertitudes sur l’avenir… Les jeunes ont été particulièrement touchés par cette période éprouvante.

Et les conséquences se font encore ressentir aujourd’hui. Les demandes de soins pour troubles psychiatriques explosent, mais paradoxalement, seule une minorité des jeunes en souffrance accède réellement à une prise en charge. Par manque de moyens, par peur du regard des autres ou simplement parce que les parents et enseignants ne repèrent pas toujours les signes de détresse.

Une pression scolaire et sociale écrasante

Réussir à tout prix. Voilà le message implicite que reçoivent de nombreux collégiens et lycéens. Entre les examens, les attentes des parents, la pression pour entrer dans les meilleures écoles et la compétition permanente, le stress scolaire est devenu une source majeure d’anxiété.

À cela s’ajoute une pression sociale grandissante. L’image de soi est aujourd’hui scrutée, likée, commentée en permanence sur les réseaux sociaux. Instagram, TikTok, Snapchat…

Autant de vitrines où l’on compare son corps, sa vie, ses succès à ceux des autres. Une comparaison souvent biaisée qui peut engendrer un profond mal-être. Selon plusieurs experts, le mésusage des réseaux sociaux est un facteur aggravant des troubles anxieux et dépressifs. La quête de perfection et la peur du rejet social peuvent conduire à une perte d’estime de soi, voire à des comportements autodestructeurs.

Harcèlement scolaire et cyberharcèlement : des traumatismes invisibles

Le harcèlement scolaire est un fléau qui touche 1 élève sur 10 en France, selon le ministère de l’Éducation nationale. Insultes, humiliations, violences physiques… Le harcèlement détruit la confiance en soi et peut mener à une détresse psychologique profonde.

Mais aujourd’hui, le harcèlement ne s’arrête plus aux grilles de l’école. Avec les réseaux sociaux, il se poursuit jour et nuit, sans répit. Le cyberharcèlement peut prendre des formes variées : messages haineux, rumeurs, montages humiliants… Pour les jeunes victimes, chaque notification devient une source d’angoisse.

Troubles alimentaires, addictions : des signaux à ne pas ignorer

Face à leur mal-être, de nombreux adolescents développent des comportements à risque. Les troubles du comportement alimentaire (TCA), comme l’anorexie, la boulimie ou l’hyperphagie, sont en forte hausse chez les jeunes, notamment chez les filles.

D’autres cherchent à fuir leur souffrance en se réfugiant dans des addictions : drogue, alcool, jeux vidéo, écrans… Ces comportements peuvent être des signaux d’alerte d’une détresse psychologique sous-jacente.

Une prise en charge encore insuffisante

Malgré l’ampleur du problème, l’accès aux soins reste limité. Trop peu de pédopsychiatres, des délais d’attente interminables, un manque de structures adaptées… Beaucoup de jeunes en souffrance ne reçoivent pas l’aide dont ils ont besoin à cause de ce un manque criant de spécialistes.

En France, on compte seulement 1100 pédopsychiatres, soit un pour plus de 15 000 enfants et adolescents selon le Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux, 2023. Résultat : des délais d’attente pouvant aller jusqu’à 18 mois pour un premier rendez-vous en secteur public.

Heureusement, des initiatives existent. La Fondation Santé des Étudiants de France (FSEF) est l’une des institutions de référence pour la prise en charge des jeunes en détresse psychologique. Elle accompagne chaque année 13 000 adolescents et jeunes adultes dans ses 26 établissements, en leur proposant un parcours alliant soins et poursuite des études.

Que faire si un jeune va mal ?

Parents, enseignants, amis… Chacun peut jouer un rôle pour repérer les signes de mal-être et agir. 

  • Isolement, perte d’intérêt pour les activités habituelles.
  • Changement brutal de comportement, irritabilité, crises de larmes.
  • Troubles du sommeil, fatigue constante.
  • Baisse des résultats scolaires sans raison apparente.
  • Discours négatif sur soi-même, pensées suicidaires.

Si un jeune exprime sa détresse, ne le laissez pas sans réponse par peur de mal agir.  Écoutez-le sans minimiser sa souffrance et encouragez-le à consulter un professionnel de santé. Des dispositifs gratuits existent. Le dispositif “Mon soutien psy”, mis en place par l’Assurance Maladie, permet aux jeunes dès 3 ans de bénéficier de jusqu’à 8 séances gratuites avec un psychologue, sans avance de frais et sur orientation d’un médecin.

La mobilisation en faveur de la santé mentale en 2025 en tant que Grande Cause Nationale est une avancée importante. Reste à voir si elle sera accompagnée des moyens nécessaires pour véritablement aider les jeunes en souffrance.

À SAVOIR

Selon une enquête de l’Observatoire de la Vie Étudiante (OVE, 2023), près de 30 % des étudiants ont déjà envisagé d’arrêter leurs études à cause de troubles psychologiques. L’anxiété et la dépression sont les principales causes d’absentéisme et d’échec scolaire.

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Ma Santé

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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